bitchcraft (nora)

bitchcraft

@Nora Bowen

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Elle avait été congédiée, comme un nuisible qu’on balaie hors de sa demeure. Congédiée, mais sitôt qu’elle avait quitté l’hôpital de Springwood la blonde rentra en croisade dans le but de rallier à sa cause une alliée. Elle avait certes des milliers de followers à travers le monde, deux tiers d’entre eux ne la prenaient pas au sérieux, voyaient dans ses vidéos, photos témoignages et textes des mise en scène, un univers créé de toute pièce par une riche dérangée faisant aujourd’hui office d’attraction sur Instagram. Elle était déjà riche avant de devenir influenceuse et peu importe ce qu’elle faisait, on continuait de croire au canular. Rendez-vous à six heure à l’entrée de la forêt côté cimetière. Tabatha en avait assez de jouer; elle appela un taxi qui la conduisit jusqu’à son appartement et une fois à l’intérieur, elle ferma à double-tour avant de prendre une profonde inspiration contre la porte.
Là où à tout moment on pouvait l’empaler et lui ôter la vie depuis l’autre côté. Elle fit trois pas en avant à cette pensée, avant de se ressaisir. Elle alluma le chauffage dans la salle de bain et se fit couler un bain brûlant dans lequel elle ajouta du miel, jeta de la lavande séchée, du romarin frais et de la sauge écrasé. Elle ferma les rideaux pour taire toutes indiscrétions et alluma les guirlandes de parts et d’autres de son appartements aux murs élevés. Elle se déshabilla ensuite, délaissant le costume d’infirmière pour apparaître dans sa splendeur féminine, libre et traversant l’espace de son nid. Elle attrapa dans sa cuisine une bouteille de champagne qu’elle entama sans prendre la peine d’utiliser un verre, et se dirigea jusque dans sa salle de bain pour se loger dans la baignoire, antique et plus grande que celle qu’on pouvait trouver ailleurs en ville. Elle essaya de se détendre, se reposant dans le silence et la chaleur, à grandes goulées de champagne unique en provenance direct de France. Elle rouvrit les yeux subitement, consciente que ce n’était pas un bain ou l’ambroisie qui serait en mesure de la préparer à qui elle s’apprêtait à faire face.

Une fois propre, elle enfila des sous-vêtements de luxe avant de s’installer face à son mourir pour purifier sa peau, l’hydrater et la recouvrir de fines couches de poudre et de fond de teint avant de garnir ses yeux d’un eye-liner félin et d’un mascara qui seraient d’ici quelques heures les flots de ses larmes endiablées. Elle se maquilla les sourcils, les redressant et lui donnant un air plus sévère encore; avant de garnir ses lèvres d’un rouge à lèvre écarlate. Déodorant et parfum hors de prix à des zones stratégique, elle pénétra ensuite dans son fabuleux dressing pour enfiler une chemise Jacquard, noire avec un noeud pendant, un pantalon de la même couleur, très ample dans lequel elle avait l’impression de flotter. Elle lissa ensuite sa crinière de lionne, jusqu’à nouer sa masse dans en un chignon des plus strict retenu par des épingles ornés de perles. Elle enfila une paire de collants et ses bottines de méchantes sorcière, attrapant à la volée une longue fourrure grise. Elle se regarda ensuite dans le miroir, et immortalisa le moment de plusieurs selfies. Elle faisait toujours la moue, c’était son expression naturelle; nul ne serait en mesure de dire à quel point elle était terrifiée en postant cette photo sur instagram.
Emoji Shady Moon. Emoji araignée. Emoji chandelle.

Elle arriva plutôt rapidement au cimetière, à pieds désireuse de prendre l’air. Les jours avaient rallongé mais l’obscurité demeurait froide et mordante, elle ne regrettait pas sa fourrure et assistait à la golden hour qui précédait les ténèbres: Springwood semblait en cet instant taillé dans l’or et le corail, une brise estivale soufflait sur la commune et tout semblait en apparence idyllique, paisible. Mais dans les tripes de la jeune femme, elle sentait la mer de serpents et la bouche des enfers se déchaîner. Samantha le savait, elle savait tout de Tabatha, du moindre de ses faits et gestes. La sorcière avait eu l’ascendant sur sa descendante plus tôt, dans la morgue: c’était maintenant au tour de l’influenceuse de lancer la balle. Elle traversa les tombes, sa queue de cheval raide emportée par le vent et elle arriva ensuite sur le sentier qui menait à la forum entourant Springwood. Il était six heure pile, et elle remarqua sans trop tard à l’entrée des bois sombres la voiture de Nora, et l’infirmière patientant derrière son guidon. La garce sortit la main de sa poche et l’agita avec un large sourire “Notre première soirée entre copines, j’a-dore !” articula-t-elle en roulant les yeux au ciel lorsque la brune descendit de son véhicule “Tu prends le pyjama jaune, moi le vert et Chandler aura son rouge éternel.” petite référence cinématographique qui allait à l’encontre de ce que Tabatha renvoyait: elle ressemblait à la Mort, la famine animée sur ses lèvres carnassières. Elle portait la couleur du deuil, même si le deuil n’avait plus aucune couleur de nos jours. Elle tourna ensuite son regard sur les bois, elle entendit les branches grincer et les arbres se raidir “Samantha Weaver a été pendue dans cette forêt il y a…” elle bougea ses lèvres, comme un cheval le ferai “Il y a longtemps. Et si on profite des dernières de notre ami Soleil, je peux nous conduire à cet arbre maudit. Plus rien ne pousse autour de lui, et…” elle haussa les épaules “Faut croire que mêmes les légendes sont sexistes. Samantha Weaver a été oubliée, et ne s’en prend qu’à moi.” elle afficha un sourire triomphant, très ironique “Elle est réelle, aussi réelles que quantités d’autres atrocités qui nous tourmentent.” elle n’avait plus peur pour passer pour une pauvre folle, puisqu’elle doutait que Nora fasse demi-tour à ce stade. Au mieux, l'infirmière allait croire que Tabatha cherchai à l’effrayer, ce qui ne ferait que piquer la curiosité de cette très intelligente fille “Merci pour m’avoir laissé filer en douce au fait ! La dernière fois que je suis tombé chez le directeur, j’ai du sucer ce porc.” elle enjamba une racine en balançant cette information et se tourna vers Nora “Est-ce que tu peux me prendre en photo à l’entrée de la forêt ? La lumière du coucher de soleil est parfaite !” elle tendit son téléphone à sa coéquipière, avant d’enchaîner les poses digne d’un magazine de mode à l’entrée du royaume des ombres, dans sa tenue morbide.

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